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LE PARTICULIER IMMOBILIER
article paru dans le N° 190 de septembre 2003
Alésia-Tombe
Issoire,
le premier quartier vert
divise les parisiens ……
Les automobilistes devront finir par se faire une raison: ils ne
sont plus les bienvenus dans la capitale.
Après les « Quartiers tranquilles" mis en place
par la précédente équipe municipale, voici
les
" Quartiers verts ", issus
du Plan de déplacements urbain (PDU) avec lesquels coexistent
des zones 30 où, simplement, la vitesse est réduite.
« Tenter de redonner une âme à certains quartiers
en jouant sur le thème majeur des déplacements, tel
est l'enjeu des Quartiers verts ", résume Philippe Cauvin,
chef de l'Agence de la mobilité de la Ville de Paris.
Dos d'âne et jardinières
Au programme des Quartiers verts actuellement envisagés (voir
carte p.26J : la limitation de la vitesse à 30 km/heure,
une savante redistribution des
sens de circulation, visant à créer
un labyrinthe propre à
dissuader les non-riverains d'emprunter les
voies mineures en se créant un itinéraire Bison futé
personnel. Complétée par l'installation de dos d'âne
et de chicanes, pour brider la vélocité automobile.
Et, pour mériter leur nouvelle dénomination de Quartier
vert, honneur au végétal:
plantation d'arbres, apparition de jardinières et de murs
pignons tapissés de verdure. Enfin, dans le but d'encourager
la convivialité et le commerce de proximité, l'aménagement
de placettes, à proximité des marchés et aux
alentours des écoles.
Avant d'entamer la phase de réalisation, les services municipaux
de la Direction de la voirie et des déplacements auront
posé un diagnostic prenant en compte
les paramètres propres au secteur concerné (taux de
motorisation, densité des commerces et activités,
présence de transports en commun, fréquence des accidents
de la route, etc.). Un certain
nombre de propositions seront ensuite élaborées
pour être présentées lors des réunions
de concertation entre élus, représentants des associations,
riverains et services techniques de la Ville de Paris, de façon
à alimenter et, éventuellement, à réorienter
le projet en tenant compte des observations formulées.
Une concertation qui ne fonctionne
pas toujours au mieux,
ainsi que l'expérience du quartier Alésia-Tombe Issoire,
(délimité par l'avenue du Général-Leclerc,
le boulevard Jourdan et l'avenue René-Coty), le premier à
s'être mis au vert, l'atteste.
Malentendus
Englobant deux Quartiers tranquilles préexistants (Hallé
et Artistes), son aménagement, programmé entre juin
2002 et juin 2003, a mal démarré: les
termes flous et quelque peu abscons de la présentation du
projet aux riverains « requalification
" d'une place, "reconquête" d'une autre, notion
de « convivialité améliorée ", de
«renforcement de la végétalisation " ont
manifestement manqué leur but.
Ne retenant dans l'appellation que la notion de végétal,
la plupart des habitants des 65 hectares sur lesquels s'étend
le Quartier vert s'attendaient à voir apparaître des
plantations et s'en réjouissaient. Las, ce
sont des panneaux de sens interdit qui ont fleuri dès
le mois de juillet 2002... avec, pour être juste, la plantation
de six arbres et la pose d'une douzaine de jardinières.
La grogne des riverains se manifeste aussitôt.
Les associations, collectifs et comités de quartier dont
le « Comité quartier 14 », constitué quelques
jours après la mise en place du nouveau plan de circulation,
qui souhaite, à peu de choses près, un retour à
l'ancien régime se multiplient.
« C'est Clochemerle... », avoue un responsable du collectif
de la rue Beaunier qui se plaint, pour sa part, de voir maintenant
passer sous ses fenêtres plus de 300 bus par jour!
Dès le milieu de l'été 2002,
l'objectif principal du dispositif -dissuader le trafic de transit
-semble en passe d'être atteint, mais
il s'opère, comme on pouvait s'y attendre, par un report
de circulation sur d'autres axes.
Face aux levées de boucliers des riverains de ces axes, la
mairie du XIV arrondissement relance la concertation avec la création,
en septembre 2002, d'un Comité de suivi et d'évaluation
du Quartier vert. Les associations sont invitées aux réunions
de ce dernier et les conseils de quartier, récemment institués,
y participeront également. Mais la première assemblée
plénière n'aura
lieu qu'en janvier 2003.
En attendant, le Quartier vert prend forme. Pour
le bonheur des uns et le malheur des autres.
Aux uns, une place « qualifiée et arborée»
au pavage flambant neuf, agrémentée de plantureuses
jardinières et d'une fontaine Wallace trônant en son
centre.
Aux autres, les bouchons, les
klaxons et la pollution.
Des voix favorables commencent à se faire entendre, comme
celles des parents d'élèves satisfaits de l'aménagement
du plateau piétonnier Alésia-Sarrette- Tombe Issoire,
autrefois répertorié parmi les dix carrefours les
plus dangereux de Paris, et qui fait face à un important
groupe scolaire. Et les commerçants, pour la plupart franchement
opposés à la limitation de la circulation automobile
dans les premiers temps, ont aujourd'hui rengainé leurs revendications.
Ils ont en effet constaté que non seulement leur chiffre
d'affaires ne se trouvait pas écorné, mais qu'ils
pouvaient même bénéficier de ce retournement
de situation en faveur du piéton.
Vases communicants
Reste le problème délicat
du stationnement. Un argument balayé
en trois chiffres par Geneviève Bellenger, conseillère
du XIV- arrondissement et déléguée aux transports:
« A ce jour, quinze places seulement ont été
supprimées, et comme nous allons en créer douze nouvelles,
le déficit se résumera à... trois places ».
Plus grave, le problème
des rues autrefois paisibles et qui voient
affluer la circulation, comme la rue Lacaze, la rue du Loing, la
rue Saint- Yves... Un nouveau plan de circulation, mis en place
en juillet 2003, devra faire ses preuves.
Et aucune amélioration en vue pour les riverains de l'avenue
du Général- Leclerc, un axe rouge destiné à
être réaménagé. Sans surprise, les agences
immobilières locales font état d'une décote
de 20 % sur les prix moyens du quartier pour les appartements situés
sur cet axe rouge.
Quant à l'impact de l'aménagement du Quartier vert,
elles notent tout juste un intérêt redoublé
pour les rares affaires qui s'échangent dans le « micromarché
» du carrefour Alésia-Tombe Issoire. Aux yeux de Claude
Moënner, de l'agence Castim, implantée rue d'Alésia,
« la montagne a accouché
d'une souris ».
Alors, les Quartiers verts, une tempête dans un verre d'eau,
ou une véritable amélioration de la qualité
de la vie, comme l'affirment les élus? Les Parisiens vont
avoir l'occasion de se faire une opinion, au rythme des consultations
locales qui devraient se multiplier dans les mois à venir.
Françoise JUERY – Le Particulier Immobilier
N°190 Septembre 2003
(gras-italique mis par
le webmaster)
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